Arielle Dombasle : galerie

La séductrice se veut immortelle, comme l'hystérique, éternellement jeune, et sans lendemain, à la stupeur de tous, étant donné le champ de désepoir et de déception où elle évolue, étant donné la cruauté de son jeu. Mais justement elle y survit parce qu'elle est hors psychologie, hors sens, hors désir. Ce qui tue les gens et les fatique, c'est le sens qu'ils donnent à leurs actes - or la séductrice n'accorde pas de sens à ce qu'elle fait, elle ne supporte pas le poids du désir.
in Jean Baudrillard, De la séduction

Partout où nous rencontrons le "naif" en art, il faut au contraire y reconnaitre l'effet suprême de la civilisation apollinienne, laquelle doit toujours commencer par jeter bas un royaume des Titans et terrasser des montres, et qui doit avoir triomphé, par de puissants mirages et d'agréables illusions, de la profondeur terrifiante de sa conception du monde et de son sens exacerbé de la souffrance. Mais qu'il est rare qu'on atteigne au naïf, à cet engloutissement total dans la beauté de l'apparence!
in Nietzsche, La naissance de la tragédie

Inutile de le nier, il y a peu de photos dans cette "galerie" et aucune n'est franchement rare ou originale. Mais que reste t-il à ajouter après le livre de Victor Hache ( ici )? Et puis je concois difficilement de "donner à voir" des photos sans essayer de transmettre un peu du sens qu'elles ont pour moi. J'ai donc choisi presque spontanément d'"illustrer" les photographies avec des passages de mes lectures qui m'avaient évoqué irrésistiblement Mme Dombasle.

Il n'y de photographique que ce qui est violé, surpris, dévoilé, révélé malgré soi, que ce qui n'aurait jamais dû être représenté parce qu'il n'a pas d'image ni de conscience de lui même. Le sauvage, ou ce qu'il y a de sauvage en nous, ne se réfléchit pas. Il est sauvagement étranger à lui même. Les femmes les plus séduisantes sont celles qui sont le plus étrangères à elles-mêmes (Marylin). La bonne photographie ne représente rien, elle capte cette non-représentativité, l'altérité de ce qui est étranger à soi-même (au désir et à la conscience de soi), l'exotisme radical de l'objet.
In Jean Baudrillard,La transparence du mal
J'ai bien sur choisi ce texte à cause des questions qu'il pose, puisque ce qui justement me fascine dans les photos de Mme Dombasle est cette impression d'un contrôle total de (ou d'une connivence parfaite avec) l'objectif. Mais que l'appareil soit remplacé par une caméra, comme ici, et subitement...

Bien sur le porno, bien sur la tractation sexuelle n'exercent aucune séduction. Ils sont abjects comme la nudité, abjects comme la vérité. Tout cela est la forme désenchantée du corps, comme le sexe est la forme abolie et désenchantée de la séduction, comme la valeur d'usage est la forme désenchantée des objets, comme le réel en général est la forme abolie et désenchantée du monde.
Mais aussi jamais la nudité n'abolira la séduction, car elle redevient instantanément autre chose, la parure hystérique d'un autre jeu , qui la dépasse.
in Jean Baudrillard, De la séduction

Venus pose un problème particulier : son nom est, visiblement, un ancien neutre abstrait, passé au féminin (ce qui ne se marque qu'à l'accusatif), dont le verbe uenerari (uenerare) est dérivé comme, de opus, operari. ... . Anciennement, uenerari n'est employé que pour exprimer un mouvement et plus encore une attitude de l'homme envers les dieux: non pas proposition du type do ut des, prière-contrat, fondée sur le ius et la fides, mais effort pour charmer, pour capter la bienveillance du dieu ; uenerari, c'est tâcher de plaire, "faire des grâces" au dieu dont on espère, en retour, sans négociation, une autre forme de gentillesse, sa uenia.
in Georges Dumézil, La Religion Romaine Archaïque

ADORABLE. Ne parvenant pas à nommer la spécialité de son désir pour l'être aimé, le sujet amoureux aboutit à ce mot un peu bête : adorable!
in Roland Barthes, Fragments d'un discours amoureux